late night talk. (brilippe)

La voiture à peine démarrée tu réalises que tu te fous royalement de cette histoire de restaurant indien, être dans un endroit confiné comme celui-ci avec elle te donne faim de toute autre chose...
Tu roules sans trop faire attention à l'endroit où tu te rends jusqu'à ce qu'elle t'incite à arrêter la voiture, de façon un peu trop autoritaire, et tu tournes la tête limite inquiet, croyant une fraction de seconde que finalement non elle ne peut pas être en ta présence, qu'elle ne veut plus jamais te voir, qu'elle te déteste. Mais dans son regard tu vois absolument tout sauf ça, tu souris de l'intérieur, finalement le vieux con que tu es, a toujours autant d'effet sur elle. Tu gare la voiture tant bien que mal sur le côté de la route, espérant en ton fort intérieure qu'à cette heure personne ne s'arrêtera... d'un autre côté tu te félicite d'avoir choisi les vitres tintées. Contact coupé, elle ne te laisse pas même le temps de penser, et elle est déjà sur tes genoux, tu t'étonne toujours qu'elle soit si souple...
Tes lèvres accueillent les siennes avec fougue, tu ne pensais pas pouvoir refaire ça de si tôt, voir jamais. Ta main passe dans son dos, avant de venir glisser sous sa robe, la remontant un peu alors qu'elle te repousse d'un coup. Et tu ris, t'es bien obligé.
Crois moi que si ça a cet effet, je vais te le dire très souvent... De ta main libre tu actionne le levier qui te permet de reculer complètement ton siège vers l'arrière de l'habitacle, faisant passer sa robe au dessus d'elle pour la lui retirer. Tes mains s'attardent sur ses épaules, descendant le long de sa poitrine, jusqu'à glisser contre ses hanches pour la ramener un peu plus à toi, tes lèvres accrochant de nouveau les siennes, comment peux t-elle te rendre aussi fou ? Tu te le demande encore.

Ses mots te font sourire, tu le hais profondément, c'est clair, mais pas à cet instant. Là, tu le retrouves, le Philippe qui te fait rire, qui te fait tourner la tête, ses mains sur tes cuisses qui te donnent chaud, ses lèvres, son odeur teintée de whisky. Et alors même que tu sais que tu fonces tout droit dans le mur, t'accélères, pourquoi t'arrêter en si bon chemin ? Le siège recule, t'es pas surprise par sa réactivité, encore moins lorsqu'il te retire ta robe. T'es pas inquiète par ce qui peut se passer dehors, à cette heure-ci Hillsboro est calme, et quand bien même... Personne ne risque de vous voir derrière les vitres noires. T'ouvres les boutons de sa chemise, un à un, t'aimerais la lui arracher, faire sauter ces petites attaches blanches d'un grand coup, t'es trop impatiente, ça va pas assez vite, aussi t'abandonnes au bout du troisième pour soulever le vêtement et le lui retirer autrement. Tu te sers contre lui, ta poitrine contre la sienne, tu sens ton coeur aller à mille à l'heure alors que vos lèvres se retrouvent. T'as l'impression que tu vas exploser, que ton coeur brisé tente de se faire la malle, c'est aussi douloureux que c'est prodigieux, comme ça bouillonne en toi. Tu viens bientôt t'attaquer à sa ceinture, tu fais coulisser la boucle pour le libérer, tes doigts glissent, ouvrent le bouton, descendent sa braguette. T'as envie de lui, t'aimerais oublier tout le reste et c'est ce que tu fais à cet instant. T'oublies tout. Tu lui pardonnes. (...)
- Est-ce que je pourrais utiliser vos toilettes, s'il vous plaît ? tu demandes à la jolie serveuse. Elle hoche la tête et te désigne une porte au fond du restaurant, tu lui souris pour la remercier et t'y vas, laissant le loisir à Philippe de récupérer la commande. Tu refermes la porte à clé derrière toi, baisses ta culotte et t'installes sur la cuvette. Tu réfléchis, passes tes deux mains sur ton visage. Putain... de merde... Bon, Brionny, ça va aller. Tout va bien. C'est Philippe. Tu le connais. Tu peux oublier pour ce soir, laisser tout ça de côté. Est-ce qu'il le mérite ? Peut-être pas. Mais toi ? Tu mérites de passer cette soirée sans ressentiment. D'essayer, au moins. Tu mérites de passer une putain de bonne soirée. Quand tu ressors des toilettes tu lui adresses un sourire. Tu t'es recoiffée un peu, passée de l'eau sur ton visage, t'as l'air moins... débrayée, tes yeux puent moins le sexe. La serveuse vous tend un sachet et vous repartez avec. Une fois dehors, alors que vous atteignez la voiture, tu demandes :
- Tu as des cigarettes ?

Ce contact t’a manqué, tu le sais, tu le ressens bien plus que tu ne le pensais. Tu n’avais certes pas imaginé que cela se passerait ainsi, mais tu es loin de t’en plaindre. Arrivé au restaurant, tu vas vers le comptoir, la laissant s’éclipser aux toilettes, tu converses une minute avec la serveuse, payant ta commande, attrapant le sac qu’elle te tend alors que Brionny émerge de nouveau des toilettes, Tu restes silencieux, saluant poliment l’employée avant de sortir, lui emboîtant le pas jusqu’à la voiture. Quelque chose sur son expression a changé, mais tu n’as pas vraiment envie de la questionner, tu ne veux pas gâcher ce moment. Tu hoches la tête à sa question, ouvrant la portière passager, tu poses le sac de victuailles au sol, ouvrant la boite à gants pour récupérer un paquet de cigarette et un briquet. T’es pas un grand fumeur, ça dépend du moment simplement. Tu sors une cigarette que tu lui tends, actionnant le briquet pour la lui allumer avant de faire de même pour toi.
Notre premier tête à tête a fini ainsi… sur une cigarette, dans mon bureau. Tu lui souris, te demandant tout de même ce qu’il se passe dans sa tête. Tu es toi même parfois un peu mal à l’aise de la regarder dans les yeux, et dans ces moments-là tu te sens lasse des intrigues, des coups fourrés et sur cette pensée précise que tu t’entends dire Tu as raison, peut être que je devrais simplement accepter mes responsabilités, je vais faire en sorte que mon infidélité soit révélée et de cette façon le divorce sera prononcé, qu’elle le veuille ou non… mais je ne t’impliquerais pas ne t’en fais pas. Je ne veux pas que tout cela t’éclabousse. Trouver une nana à qui payer un verre dans un bar et lui mettre la main aux fesses suffiraient amplement, plus un petit billet pour que celle-ci atteste qu’il y a eu plus, ainsi plus de manigance contre ta femme, juste de quoi tirer un trait sur tout ça.

Tu prends la cigarette et la coince entre tes lèvres alors qu'il s'approche pour te l'allumer, actionnant le briquet, la flamme jaillit et tu laisses le bout de la tige s'embraser avant de reculer un peu, tu tires dessus, longuement. T'as jamais été une grosse fumeuse, plutôt le genre fumeuse occasionnelle, une clope de temps en temps, en soirée, t'as jamais vraiment eu de paquet sur toi. Rarement. Tes yeux se perdent un peu mais tu les relèves quand t'entends la remarque de Philippe sur votre premier tête, tu penches la tête sur le côté, un léger sourire se dessine sur tes lèvres celées, tu demeures silencieuse. Ça a presque quelque chose de romantique, cette façon de te dire qu'une chose lui fait penser à un autre moment avec toi. Sa voiture. L'odeur de la cigarette. Vous aviez vécu des moments forts ces derniers mois et toi aussi, certains souvenirs t'éclataient au visage, parfois avec tendresse, parfois avec amertume. Tu reprends une bouffée de nicotine, t'as l'impression que ça te détend, et t'es étonnée par ce qu'ajoute Philippe. Tu te demandes, évidemment, si c'est un geste vers toi qu'il fait, t'es pas sûre de comprendre, est-ce qu'il a vraiment considéré tes "conseils", qui n'en étaient pas vraiment mais qui visaient uniquement à le voir divorcer plus rapidement ? Souhaitait-il réellement en finir comme ça avec son mariage ? Qu'en était-il de ses affaires qu'il souhaitait protéger en faisant accuser son épouse ?
- Qu'est-ce qui te fait changer d'avis ? tu lui demandes.
Vous vous envoyez en l'air dans sa bagnole et tout à coup il reconsidère la vitesse à laquelle il veut divorcer? Mouais...

T’as beau retourner le truc dans ta tête, tu te rends compte que t’as passé ta vie à jouer des plans, à préparer des coups d’avance, enfin en gros à te prendre clairement le chou… appeler ça la crise de la quarantaine ou autre chose, tu ressens la fatigue, la lassitude face à cette vie-là, à cette partie de toi. T’as jamais été un gars très bien, mais t’as certainement gravi les échelons du connard fini à cause de cette relation toxique, la preuve même pour ton divorce, tu prévois des plans machiavéliques, c’est ridicule… T’as juste besoin de tourner la page et au final le plus tôt sera le mieux, le fait que les choses traînent pourrait clairement avoir pour effet qu’elles n’aboutissent jamais, par n’importe quel retournement de situation qui pourrait survenir, que tu n’aurais pas vu venir… et ça tu n’en veux pas. Sa question est légitime et tu sais plus ou moins ce qu’elle a dans la tête.
Tu m’crois si je te dis que je suis fatigué ? Parce que c’est le cas… tout a toujours été… compliqué. Sauf avec toi, c’est simple... Tu t’interromps, tire sur ta clope, t’as juste envie de plus trop penser, de laisser les choses se faire sans trop te poser de questions.
Je veux pas renoncer à certaines choses, et avec les années j’ai su me protéger, pour le reste… je l’assumerais, si j’en suis capable… et advienne que pourra. La vérité ne fait pas le plus grand bien en ce qui te concerne, mais finalement elle était tout autant mouillée que toi, et c’était peut être ça ton assurance pour l’avenir.

Avec toi c'est simple.
Ahh, Philippe. Si seulement. T'aimerais lui dire que ça ne l'est plus, plus maintenant. Ça l'était avant, simple. Tu t'amusais de votre relation, tu te laissais porter, t'aimais être sa maîtresse, celle avec qui il parlait de sa vie, de ses enfants, celle à qui il parlait avec franchise, à qui il donnait des conseils. Philippe, mine de rien, il t'a aidé, beaucoup, il savait comment te parler, comment orienter tes choix pour faire ce qui te semblait le mieux. T'aimais t'appuyer sur son expérience, sa maturité, tu te rappelles encore quand tu lui as dit que tu le choisirais lui plutôt que vos affaires professionnelles et à quel point tu le pensais. Tu le gratifies d'un sourire sincère, à cet instant t'aimerais te pencher vers lui, lui donner un baiser, serrer sa main dans la sienne.
- Philippe, tu commences, laissant tomber la cigarette quasi terminée sur le sol pour l'écraser, j'crois que le Philippe Beaumont que je connais n'est pas celui qui a fait... tout le reste. J'espère que je me trompe pas. Je te fais confiance.
T'es appuyée contre la voiture et tu t'écartes pour t'approcher un peu, tu gardes une distance cordiale entre vous, rien de suspect:
- Dis moi que personne d'autre n'est au courant de ce que t'as fait et ça restera... notre secret
Votre secret, enfoui à jamais, celé entre vos lèvres.

Forcément, t’as un peu le goût amer de la vérité en bouche, tu sais que quelque part tu as fait le bon choix en étant honnête, puisqu’elle t’avait avoué qu’elle te soupçonnait de toute façon d’avoir quelque chose à voir avec la disparition de sa sœur, mais maintenant, tu sens aussi que tout a changé. Tu sors un peu de tes pensées, tirant de nouveau sur ta clope alors qu’elle écrase sa clope au sol. Tu entends ce qu’elle dit, et à vrai tu espères qu’elle a raison, certes tu sais que les choix que tu as fais il y a quelques mois tu ne les ferais plus aujourd’hui… t’essaye parfois de te convaincre que tu n’es pas prêt à tout pour protéger tes intérêts mais la réalité est bien différente…
Je ne ferais rien qui pourrait te blesser ou te nuire… aujourd’hui. Ça au moins t’étais capable de le certifier. Tu laisses tomber ta clope au sol, la poussant du pied vers le caniveau. Tu relèves la tête rencontrant son regard et sa question appelle la défensive chez toi, le vieux toi, les habitudes ont la vie dure… Tu passes une main sur ta nuque, baissant les yeux quelques secondes.
Une personne est au courant… mais tu n’as pas à t’en préoccuper, c’est une personne de confiance.
Ça tu l’espères fortement, du moins tu es convaincue que cette histoire ne ressortira jamais, car cette personne a plus à perdre que toi… car même si tu es responsable de la disparition d’Harper, tu ne l’as pas tuée, et aucune preuve ne te relit à quoi que ce soit, tu n’as jamais rien fait par toi même. Tu te rapproches d’elle, passant une main dans ses cheveux, les ramenant dans son dos. Je suis vraiment désolé, pour tout.

T'es prête à lui faire confiance, peu importe ce que ça va te coûter. C'est ça ton dernier choix Brionny ? Faire confiance à Philippe ? Le type qui a fait disparaître ta soeur ? Il aurait été préférable que tu retombes dans les bras de Julian. C'aurait été beaucoup plus simple. Tu lui aurais dit que tout était pardonné, que tu l'aimes, vous auriez pu vous marier, enfin!, et avoir des enfants. Vivre heureux tous les deux. Puis vous auriez vécu pleins de regrets, tu le sais. Ce n'était pas fait pour aller plus loin. Mais Philippe, vraiment ? C'est ce que tu veux ? Te relancer dans une histoire qui ne te mènera nul part ? Philippe ne t'épouseras jamais, il a déjà des enfants, ce qu'il cherche c'est juste... une maîtresse. T'entends la voix de ta conscience te dire ce que tu refuses d'entendre. Tu la mets en sourdine. Tu hoches la tête aux mots de Philippe. Tu le crois quand il te dit qu'il ne te ferait rien de mal.
Tes lèvres se serrent quand il t'annonce qu'une autre personne est au courant et tu paniques l'espace d'un instant, tes yeux s’alertent, tu te masses le front, inquiète, c'étai pas du tout ce que t'avais envie d'entendre. Maintenant une autre personne est au courant ? Putainnn... Allez Brionny. Reste calme. Tu prends une longue inspiration, tu soupires, tout va bien se passer.
- Ok...Ok....
Tu le repousses un peu, fais un pas en arrière et passes tes mains sur ton visage. T'as besoin de quelques secondes pour te reprendre, pour essayer de te remettre les idées en place. Puis ça y est, t'es prête.
- Rentrons, je meurs de faim...

Elle est très loin d'être soulagée et tu la comprends. Tu lui as menti, plus d'une fois, tu l'as regardé dans les yeux, tu l'as écoutée parler de la disparition de sa soeur, de la peur qu'elle ressentait, de sa tristesse et tout ça en développant une relation que certes tu n'avais pas vu venir. Tu accepte sa réponse timide et tu comprends le fait qu'elle n'ai pas très envie d'être touchée. Tu hoches simplement la tête, reprenant vite ta place derrière le volant, roulant vers son appartement. Arrivé en bas de l'immeuble tu te gares, coupe le moteur, tu commence à te demander si c'est vraiment une bonne idée... qu'est ce que ça t'apporte, et qu'est ce que ça lui apporte à elle ? Tu ne bouges pas finalement, les mains sur le volant, avant de détacher ta ceinture mais tu reste assis là.
- Qu'est ce que tu attends de moi Bri' ? Tu m'as dit qu'on pouvait passer au dessus de tout ça mais.... Tu t'interromps, prenant une grande inspiration et finalement. - Peut être que tu n'en es pas capable ?! Ce que je comprendrais, je ne dis pas que je veux tout arrêter, mais je pense qu'il faut prendre en compte le fait que tu es jeune... tu as la vie devant toi, tu n'as pas d'obligation à t'attacher à moi... Tu finis par poser les yeux sur elle, lui laissant encore le choix de sortir de cette voiture avec ou sans toi.

Tu regardes par la vitre pendant tout le trajet, ça ne dure pas longtemps, tu sens la chaleur et l'odeur de la bouffe indienne à tes pieds. Tu restes silencieuse, tu réfléchis à tout ça, à ce qui est entrain de te passer. Tu te demandes si tu fais le bon choix, évidemment. Lorsque la voiture s'arrête, enfin, tu vois que vous êtes arrivés, il a trouvé une place juste en bas de chez toi. Tu détaches ta ceinture mais tu t'interromps dans ton mouvement pour sortir de la voiture lorsqu'il te demande ce que tu attends de lui. Tu soupires, tournes ton visage vers lui, mais il n'en a pas terminé avec toi. Il te laisse le choix. Il te dit que t'es jeune, que tu n'as pas à t'attacher à lui, comme s'il avait lu dans tes pensées. Tu sais tout ça, tu le ressasses depuis trois semaines, tu le ressasses encore plus vite dans ton esprit depuis deux heures. T'as aucune idée de ce qui te pousse vers lui. Tu baisses les yeux un instant, t'es perdue, tu sais pas quoi lui répondre. Tu sais pas. T'as pas envie de te décider maintenant. T'as pas envie de fermer cette porte. Ça t'angoisse totalement. T'aimerais oublier tout ça, revenir à comme c'était avant, oublier, ne pas savoir ce qu'il a fait. Finalement c'était bien mieux quand tu ne savais rien.
- Ecoute, j'vais être honnête... J'ai aucune idée de ce que je dois faire. Je... sais pas. Ça te va comme réponse ?
La Brionny qui contrôle tout et qui sait faire les meilleurs choix n'est pas là ce soir. T'ignores quand elle t'a quitté. Probablement quand Philippe a tout fait voler en éclat en te dévoilant la vérité. Tu soupires, attrapes ton sac à tes pieds pour le serrer contre toi.
- Je t'ai détesté ces trois dernières semaines, vraiment, chaque jour. J'ai pas arrêté d'y penser. De penser à toi. Et j'ai beau retourné le truc dans tous les sens j'ai aucune idée de ce que je dois faire, de si je pourrais te pardonner, laisser ça dans un coin et juste... vivre normalement. Mais, c'est clair que toi et moi... Sur la durée ? Ça va durer... quoi ? Six mois, un an, peut-être même plus qui sait, puis après ? Je te présente à mon père ? Tu m'épouses ? Tu me fais un enfant ? On vit heureux dans une jolie maison ? tu ris un peu, jaune, clairement, amère... J'en doute... Tu finiras par te barrer parce que toi t'as déjà fait ta vie, t'as déjà eu tout ça, un mariage, des enfants, t'auras aucune envie de te relancer là dedans, alors tu trouveras sûrement une nouvelle nana, si c'est pas moi qui te quitte, tu le feras.
Tu le regardes, débiter tout ça, lui dire finalement une partie de ce que tu ressens, de ce qui se passe au fond de toi, ça rallume cette flamme en toi, ça fait revivre ta détermination, ta confiance en toi.
- J'ai eu tellement mal ces derniers mois, entre... Harper, Julian... Toi... Que j'suis prête à me lancer là-dedans même en sachant que ça finira mal, juste parce que j'ai besoin d'être... heureuse, un petit peu. Et je l'étais avec toi.

Au final, tu te rends compte que t'aurais pas du poser de question... t'as encore été con, t'aurais pu profiter de cette soirée jusqu'au bout et ouvrir ta gueule demain matin... mais non. Enfin, t'avais besoin de savoir où tu vas, ce que tu as à attendre maintenant... et t'es pas déçu pour le coup. Sa première réponse évoque un sentiment de colère en toi, parce que tu veux pas d'une réponse bateau, tu veux pas te contenter de peu... mais après ça, elle n'en finit plus et finalement tu te surprends à avoir envie de rire d'une part et de te taper la tête contre un mur d'autre part... Tu la laisses parler, tu reste le plus calme du monde, le sanguin en toi ayant décidé de se la fermer.
- Je comprends qu'une part de toi, sans doute la plus grande d'ailleurs, me déteste.. ce que j'ai fait, peu importe mes raisons ou mes remords c'est... impardonnable. Je pense que tu devrais sans doute m'en mettre une et me dire d'aller au diable... malheureusement c'est ce que j'aurais fait si les rôles avaient été inversés... Je regarde par le pare-brise, je n'ose pas vraiment la regarder en face pour le moment... et finalement, un sourire un peu idiot s'affiche sur mon visage, alors que je laisse quelques secondes de flottement. - Alors finalement c'est ce qui te freine ? L'idée que je refuserais un jour, si cela doit arriver, de me marier avec toi... de te faire un enfant ? Finalement c'est un vrai sourire amusé qui se dessine sur ton visage et tu le réprimes pas non plus... Tu finis par la regarder. - Tu idéalises beaucoup trop ce que j'ai "déjà vécu"... j'ai fait un mariage sans amour, et j'ai à peine vu grandir mon fils... toutes ces erreurs sont les miennes bien entendu... je ne peux pas te dire où on sera dans six mois, un an ou même dix ans... mais je pense que tu prends le problème du mauvais côté... Tu fais une pause, passant une main sur ton visage avant d'ajouter. - Je pense que tu devrais plutôt te dire : est ce que j'aurais envie de ça ? Est ce que j'aurais envie de me marier avec un homme qui a vingt ans de plus que moi ? Est ce que je veux un enfant avec un homme qui aurait l'âge d'être son grand père ? Tu te mets à rire, bêtement parce que ça te fait bizarre et en même temps.... - Je peux te donner ce que tu veux, maintenant, je peux être ton amant, ton ami, quelqu'un sur qui tu peux compter les yeux fermés. Je peux te rendre heureuse, au moins pendant quelques... semaines, mois ? Peu importe... et on verra, je n'ai pas envie de planifier, je l'ai fait toute ma vie ! Tu hausses les épaules, t'es pas triste, t'es pas heureux, t'es juste... bien, peu importe l'avant, ou même l'après, tu feras en sorte que ça se passe au mieux... - Mais je comprendrais que ça ne te suffise pas bien sur...

lui foutre une gifle ? lui dire d'aller en enfer ? c'était probablement pas suffisant. t'avais plutôt envie de lui péter le nez ou de l'étouffer dans son sommeil. ça, oui. là, il souffrirait un petit peu. mais finalement, qu'est-ce que ça t'apporterait ? ça ne soulagerait pas la douleur que tu ressens, c'est clair. tu l'écoutes, ça t'a vraiment fait du bien de parler, tu te sens plus légère maintenant et encore plus quand tu l'entends te répondre. c'est vrai, tu prends le problème dans le mauvais sens, il a raison. tu le regardes, tu te sens apaisée, même si tes pensées sont troubles, ça t'a aidé de les formuler et encore plus de te sentir écouter. tu hoches la tête à ses mots, tu relâches ton sac que tu tenais avec angoisse, et tu poses ta main sur la sienne. t'as pas envie de te relancer dans un nouveau monologue, t'entends tout ce qu'il te dit, tu sais qu'il est sincère, qu'il fera le nécessaire s'il le peut et t'as pas envie de te demander maintenant s'il va t'épouser, ça t'avait même jamais vraiment traversé l'esprit avant, ni même avoir des enfants avec lui, c'était trop loin. t'aurais tout le temps pour y penser si ça devient sérieux. et à quarante ans, philippe n'était pas si vieux que ça. de plus en plus de gens font des enfants passés les 35 ans aujourd'hui, alors, bon.. si un jour tu dois te poser la question... t'y réfléchiras en prendra tout ça en compte. mais là, maintenant ? tu te mets à rire un peu, c'est l'anxiété qui redescend, tu sers sa main et tu hoches la tête.
- Quel âge tu penses que j'ai, au juste ?
ça te fait rire, tu le regardes, parce qu'il a dit vingt ans de plus, mais non, vous n'avez pas vingt ans de différence. ça te fait rire. vraiment.
- Tu sais qu'on a "que" 13 ans de différence ? Pas vingt ? Mon dieu, Philippe... t'es pire qu'une femme avec ton âge... T'es plutôt bien conservé pour un vieux schnock si ça peut te rassurer.
Tu le taquines, t'ouvres enfin la portière pour t'extirper de la voiture, tu ramasses le sac de bouffe indienne avant de lui dire :
- Allez, vient papi, j'vais te donner un coup de jeune...